Le Domaine des Pastoureaux

C’était avant la Révolution un arrière-fief de la seigneurie de Lardy. Au XVIè siècle, modeste bâtiment avec jardin clos de murs d’à peine un hectare et quelques terrains autour, il appartenait à une famille de fonctionnaires de la Cour, les Le Maçon nous en connaissons trois générations : Hugues, Jacques et François.

Ce fief comprenait également un petit hameau, Les Sellés et un moulin du même nom. Ce fief est vendu en 1665 à Alexandre Archange, premier valet de chambre de la duchesse d’Orléans et à Bonaventure Bourgeois, sa femme. Par succession et mariage, le domaine passa aux mains de Claude Denis, ingénieur et fontainier du roi qui prit part à la conception et à la réalisation des grandes eaux de Versailles et de Saint-Cloud. Il agrandit sa propriété et le hameau des Sellés disparut progressivement au profit du parc.

Les Pastoureaux restèrent, par successions féminines dans la même famille, après la mort de Claude Denis en 1680. Madame Bobières de Chars, femme de greffier en chef de la prévôté de Paris, puis Madame d’Angervilliers, femme de trésorier de France à Montauban.

Pendant la Révolution, la propriété des Pastoureaux progressivement aménagé, embellie, passa aux mains d’hommes d’affaires habiles, les Morel, qui associés avec un marchand papetier de Paris, créèrent une usine de papier qui fonctionnera de 1793 à 1797 mais sans rentabilité convenable. C’est alors qu’une certaine Mme Chambry, originaire sans doute du milieu textile, créa dans les bâtiments existants une manufacture de lacets et de passementerie. D’abord locataire elle en devint propriétaire en 1807. Elle continua en même temps à exploiter le moulin à blé des Sellés, qui fut avec le moulin Goujon et le moulin Richard, un des trois fournisseurs en blé du village de Lardy pendant les périodes difficiles de la Révolution.

Madame Chambry vendit en 1821 à Mme Doré qui fit faillite et céda la propriété et l’usine à la famille Gozzoli-Michelez. Celle-ci d’origine lilloise et déjà implantée à Paris, donna un essor important à la manufacture qui fonctionnera jusqu’à la première guerre mondiale.

Pendant un siècle, les Pastoureaux se transformèrent. Des entrepôts furent construits à droite de l’avenue des tilleuls, la vieille maison fut remplacée au début de la troisième république par l’actuelle demeure en bout d’allée, des bâtiments destinés à l’administration de l’usine et aux logements de la direction, en prolongeant la surface. La famille s’agrandit, un des frères Michelez fit construire une grande maison à côté du petit chemin menant au gré de la Juine. Il épouse la fille d’un valeureux général de la révolution et de l’empire : le baron Boyer qui passa les trois dernières années de sa vie dans la maison principale et y mourut en 1851. Léon Michelez fut un peintre connu de la vallée de la Juine, ami de Narcisse Berchère.

L’usine occupa jusqu’à 200 ouvriers. Dès la révolution on en comptait déjà plus de 80. Au fur et à mesure du déclin de la vigne dans la région parisienne, une partie de la population vigneronne trouva un emploi dans la manufacture Michelez.

De l’ancien domaine, il reste la grande allée des Tilleuls plantée par Claude Denis à qui son métier avait appris le souci du décor.

Il reste aussi en bord de Juine, de pauvres restants du moulin des Sellés, imposant bâtiment du XIVè siècle, avec une tour carrée. Il reste enfin la manufacture ancienne, transformée en appartement, témoignage rare de l’architecture industrielle à la fin du XVIIIè siècle. L’ensemble garde une réelle noblesse et les bords de Juine ne manquent pas de lui donner une séduction un peu mystérieuse.

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